Près de 2 000 commerçants et habitants lillois ont signé une pétition pour alerter sur la flambée des loyers commerciaux qui menace la diversité et la vitalité du centre-ville. 

Aujourd’hui, je suis allée à la rencontre de plusieurs de ces commerçants, dans le Vieux-Lille et en centre-ville. J’ai écouté leurs témoignages, souvent bouleversants. Ensemble, nous avons échangé sur leurs attentes et sur le plan d’action que nous portons avec Faire Respirer Lille : des solutions pragmatiques, immédiates et structurantes pour redonner de l’air à nos commerces de proximité.

Les commerçants décrivent une situation alarmante. Depuis plusieurs mois, ils constatent une chute inédite de la fréquentation dans tous les quartiers commerçants, y compris dans le Vieux-Lille. Plusieurs enseignes historiques sont en difficulté et certaines ont déjà fermé, comme Grand Scène début octobre. Cette crise économique s’ajoute à une accessibilité jugée catastrophique : plans de circulation « aberrants », absence de parkings-relais, parkings saturés et tarifs dissuasifs. « Venir à Lille est devenu une corvée », déplorent certains commerçants, qui constatent que les clients de la périphérie et les Belges désertent la ville.

À cela s’ajoutent des travaux urbains longs et mal coordonnés, provoquant jusqu’à 40 % de perte de chiffre d’affaires pour certains établissements, ainsi qu’une administration perçue comme lente et peu à l’écoute. Les délais d’autorisation en urbanisme, la propreté des rues et le manque de dialogue avec la mairie nourrissent un sentiment général de découragement. Beaucoup évoquent aussi une montée de l’insécurité autour de la Grand-Place, de Jean-Baptiste Lebas ou de la Porte de Paris, qui nuit à l’attractivité de la ville. Enfin, la piétonnisation envisagée du centre suscite des inquiétudes : les commerçants n’y sont pas opposés, mais dénoncent une absence de concertation et demandent des solutions de stationnement et de livraison adaptées.

Derrière cette crise du commerce de proximité, un facteur domine : les loyers devenus intenables. Dans certaines rues du Vieux-Lille, ils atteignent des montants records

  • Le magasin Cyrillus rue de la Grande Chaussée paie 330 000 euros par an
  • Repetto 230 000 euros plus un pas-de-porte de 600 000 euros
  • Verdure rue Basse près de 40 000 euros pour 38 m². 

À ces niveaux, 80 % des entreprises sont déficitaires. Les commerçants indépendants ne peuvent plus suivre et cèdent la place à des chaînes ou laissent leurs locaux vides.

Depuis plusieurs années, la Ville de Lille réclame un encadrement des loyers commerciaux, mais sans résultat concret. Cette mesure se heurte à des obstacles juridiques majeurs : la liberté contractuelle, la liberté d’entreprendre et le droit de propriété protégés par la Constitution. Aucune loi n’a jamais permis un encadrement général de ces loyers, et les précédentes tentatives ont échoué. De plus, une telle régulation risquerait de décourager les investisseurs ou de provoquer une raréfaction de l’offre.

Face à ces blocages, il existe plusieurs solutions, plus pragmatiques. 

Tout d’abord, il faut créer un « bail social commercial », inspiré du logement social, qui permettrait aux collectivités de subventionner certains locaux à loyers modérés, en priorité pour les commerces essentiels à la vie de quartier. La mise en place d’une véritable foncière municipale est également nécessaire, capable de préempter des locaux et de les relouer à des conditions raisonnables.

L’instauration de quotas de diversité commerciale dans certaines rues serait idéal pour éviter la prolifération de mêmes types d’enseignes et préserver l’identité du centre-ville. Deux de mes propositions de loi visent à compléter ces mesures : l’une créerait une taxe renforcée sur les locaux vacants depuis plus de six mois, pour lutter contre la spéculation foncière ; l’autre plafonnerait l’indice de révision des loyers commerciaux (ILC) à 1,5 % entre 2026 et 2027, afin de protéger les PME du commerce de proximité.

Lille a un retard important par rapport à d’autres villes comme Valenciennes ou Dunkerque, qui ont déjà mis en place des foncières et des dispositifs de soutien. Tous les outils existent depuis quinze ans. Ce qui manque, c’est la volonté politique d’agir.

En conclusion, une mobilisation rapide est urgente pour éviter l’effondrement du commerce lillois. Sans plan d’urgence pour le commerce de proximité, Lille risque de se vider de sa vitalité économique et sociale.

👉 Soutenez la pétition