Depuis plus de vingt ans, la ville de Lille met en avant un modèle culturel flamboyant incarné par Lille3000, qui s’appuie sur des événements grandioses, des installations spectaculaires et une communication hors norme. Des millions d’euros sont injectés dans des saisons ponctuelles, des expositions monumentales, des campagnes publicitaires, des inaugurations VIP… mais que reste-t-il de tout cela pour les artistes eux-mêmes ?

Une vitrine dorée, des coulisses désertées

Lille3000 est devenu le symbole d’une politique culturelle centrée sur l’image, sur l’événementiel à fort impact visuel. Les Golden Monoliths rue Faidherbe, par exemple, ne sont que l’illustration d’un pouvoir municipal plus préoccupé par le marketing urbain que par le soutien durable aux créateurs.

Ce modèle, aussi impressionnant soit-il pour le public et les touristes, ne répond pas aux besoins fondamentaux de la création artistique locale. Il néglige le tissu des artistes indépendants, des jeunes diplômés d’écoles d’art, des collectifs, des structures émergentes qui peinent à survivre sans un accompagnement réel.

Une génération contrainte de renoncer

L’excellent article du Monde publié récemment donne la parole à ces artistes qu’on n’entend jamais dans les grands discours d’auto-congratulation municipaux. Intitulé « Tous les matins, dans mon nouveau boulot, je laisse ma créativité à la porte », il dresse un constat alarmant : face à la précarité, à la rareté des débouchés, à l’épuisement moral et matériel, de nombreux artistes renoncent.
-> À lire ici : https://www.lemonde.fr/campus/article/2025/05/22/tous-les-matins-dans-mon-nouveau-boulot-je-laisse-ma-creativite-a-la-porte-les-illusions-perdues-des-artistes-contraints-de-se-reconvertir_6607699_4401467.html

Ces artistes, formés, talentueux, passionnés, sont contraints de se reconvertir dans des métiers plus stables, souvent très éloignés de leur vocation. Leur créativité, étouffée par l’absence de perspectives, finit par devenir un luxe qu’ils ne peuvent plus se permettre.

Changer de cap : une culture au service des artistes, pas de la communication

Nous devons sortir de cette logique de « culture vitrine » et remettre les artistes au centre de la politique culturelle locale. À Lille, une autre politique culturelle est possible : plus sobre, plus équitable, plus ambitieuse pour ceux qui la font vivre au quotidien.